Fête de la Croix Glorieuse Jn 3, 13-17

Frères et sœurs, nous le savons, nous le constatons même de manière régulière, il y a beaucoup de religions dans le monde, et ces dernières décennies de nouveaux mouvements religieux sont nés ici ou là. Certains peuvent paraître généreux et d'autres davantage étranges.
Alors, aujourd'hui plus qu'hier, au milieu de cette profusion de croyances, les chrétiens peuvent s'interroger : «Et nous, qui sommes-nous ? Qu'avons-nous en propre ? Qu'est-ce qu'être chrétien ?» Non point pour regarder de haut les autres ! Non, mais plutôt pour mieux prendre conscience de nous-mêmes, de notre propre joie de vivre, et cette joie, la proposer aux autres. Oui, qui sommes-nous ?

Bien des réponses pourraient être faites, mais il y a un signe qui parle plus que toutes nos paroles : c'est le signe de la croix. Cette croix que nous faisons sur nous ; cette croix, au sommet des églises ou comme ici, croix d'autel ; croix que certains portent au cou ; croix plantée souvent au carrefour de nos routes ; la croix, ce signe qui est posé sur le front de l'adulte ou du petit enfant qui va être baptisé, «signe du Christ notre Sauveur».
La croix est donc bien le signe du chrétien.

Pourtant, parfois, nous avons peur de la regarder. La croix serait-elle devenue objet d'effroi ? Quel signe paradoxal, en effet, pour dire notre vie ! La croix serait-elle signe de mort, car celui que nous y voyons suspendu est un supplicié, rappel de tous nos malheurs ? Non, frères et sœurs, la croix est le signe de la vie ! Elle montre le Christ qui a donné son existence par amour pour nous et qui, ressuscité, nous entraîne tous dans la Vie sans fin.

Quand nous voyons souffrir quelqu'un que nous aimons, ne voudrions-nous pas le secourir ? Si nous voyons notre enfant se débattre dans une rivière, n'allons-nous pas nous jeter à l'eau pour le sauver ? Au risque de notre vie ?
Jésus, le Christ, a fait cela et plus que cela ! Jésus est Dieu fait homme. Dieu, devenu l'un de nous, et il a tout compris de notre existence : nos espoirs, nos doutes, nos joies, nos larmes aussi et ces péchés qui nous accablent et nous font honte. Il en a été touché, bouleversé, mais il a fait davantage, et lui seul pouvait faire cela : Fils de Dieu, il a assumé tout de nous, il a pris notre humanité sur lui et il l'a tournée vers la vie.
Certes, sur la croix, Jésus est mort ; mais sur la croix, il transfigure notre vie. La croix n'est pas seulement une image de la mort mais elle est le signe de la résurrection du Christ et de la nôtre en Lui.
Alors, frères et sœurs, n'ayons pas peur de nous approcher de la croix et de la regarder, nous y trouverons la joie.

Oui, venons et donnons tout ce que nous sommes à notre Sauveur qui a déjà tout assumé de nous, pour qu'il nous fasse passer tout entier dans le bonheur. Donnons tout au Christ : nos maladies, nos échecs et ces jours heureux que certains découvrent enfin ... Donnons tout au Christ : nos péchés aussi.
On raconte que saint Jérôme, après des années de jeûne, de prières, de labeurs, demanda au Seigneur : «T'ai-je tout donné ?» Il espérait n'avoir rien gardé pour lui tant son amour pour le Christ était grand. Et Jésus de lui répondre : «Non, tu ne m'as pas tout donné.» «Que reste-t-il, Seigneur ?» «Donne-moi aussi tes péchés !»
Oui, frères et sœurs, sur la croix, Jésus enlève les péchés du monde, ces péchés tenaces dont nous nous libérons si difficilement, et ce péché aussi que nous portons au fond de nous dans le secret depuis tant d'années et que nous voudrions oublier.
Donnons tout : ce qui dans notre vie est lumière comme ce qui est ténèbres. Avec l'Évangile, nous proclamons : «Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé.» La croix est le signe que Dieu nous veut tous heureux.

Frères et sœurs, qui que nous soyons, quel que soit notre passé glorieux ou misérable, ou simplement ordinaire, la croix est notre fierté. Et lorsque nous commençons notre journée, un repas, lorsque nous partons en voyage ou que nous voulons prier, notre premier mouvement en dira toujours plus long que nous : paisiblement, nous ferons le signe de la croix, avec attention et respect, en détachant les mots : «Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit».
Alors, frères et sœurs, tout sera déjà dit : l'amour de Dieu pour nous, notre amour pour Lui.

Amen

F. Benoît-Marie