5° Dimanche du TO*C Lc 5, 5-11

Jésus est monté dans une des barques de Simon au lac de Génésareth et il enseigne les foules. Après avoir parlé, Jésus dit à Simon d'avancer au large et de jeter les filets pour la pêche. Là, trois clés, en quelque sorte : celle de la nuit, celle de l'obéissance et celle de la lumière.

Une clé de nuit qui ferme, une clé d'obéissance qui ouvre, une clé de lumière qui fait le jour.

  La première est une clé qui ferme sur quelque chose qui n'a plus lieu d'être. Simon avec ses compagnons pécheurs ont peiné toute la nuit sans rien prendre. Ils ont péché dans la nuit, sans lumière, au milieu des ténèbres. C'est un monde obscur aux eaux stériles où les étoiles semblent absentes. Les filets resteront vides. C'est la nuit de l'échec, la nuit du travail perdu. Car c' était une nuit de pêche sans l'étoile du matin, sans la parole du Seigneur, sans la semence de la parole de Dieu qui féconde.

Parmi la foule qui se pressait autour de Jésus pour écouter la parole de Dieu, parmi nous aujourd'hui, combien ont connu des vies sans espérance, sans lumière divine, dénuées de sens parce qu'elles étaient fermées à clé par la nuit de ce monde ? Et puis un jour retentit une parole du Seigneur qui touche le cœur, une rencontre qui fracture l'existence pour lui donner une lumière inattendue, une parole inouïe, une orientation inconnue. L'existence entre alors dans un cours inexploré, prend une direction nouvelle, un sens qui révèle une présence qui nous veut du bien, qui nous veut vivant, qui nous aime au-delà des nuits vides.

 Cette parole qui frappe à l'intime est unique, singulière, personnelle. Elle est portée par la voix de Celui qui d'en-haut rejoint tous les cœurs confus qui le cherchent sans trop savoir, qui le désirent sans vraiment le connaître, qui l'attendent sans l'avoir déjà rencontré. Comme Simon qui ne sait pas encore qu'elle est la voix qui lui dit : « Avance au large, et jettez vos filets pour la pêche. » Elle est forte cette parole. Si forte qu'elle invite à une obéissance qui sera fructueuse. Si confiante et si sûre que déjà, elle touche au but. La voix du Seigneur accomplit ce qu'elle ordonne parce que Simon aura su s'y conformé dans l'obéissance.

 

       Par sa liberté, Simon entre dans le jour d'une pêche qui sera abondante. Par la clé de l'obéissance, se révèle une réalité plus grande que les apparences. Les filets se remplissent à craquer. Les eaux sont poissonneuses.

Désormais, il fait jour, c'est la troisième clé. La clé du jour de Dieu. La clé du jour avec Dieu. Sa prodigalité annonce la profusion céléste, celle du salut, du royaume, de la vie où tout est vivant. Un monde nouveau se révèle. Il sera beau. Il sera bon. Il sera vrai. Simon et ses compagnons font l'expérience de cette prodigalité de Dieu. Et lorsque l'expérience divine saisit le cœur d'un homme, il tombe à genou comme Simon tombe à genou. Saisi d'effroi divin, de crainte révérencielle, Simon s'incline devant la force d'un homme dont la parole transforme une nuit perdue en jour prodigieux, des eaux stériles en eaux vives, des vies sans but en vies, désormais, guidées par un Maître qui vient du ciel. Simon tombe à genou, c'est la crainte instinctive de l'abîme entre Dieu et les hommes.

Frères et sœurs, ces trois clés, nous les avons toutes, ici-bas, en même temps. L'évangile nous montre quelque part comment faire avec. Nous sommes parfois perdus dans la nuit, sans trop savoir où nous en sommes. Et puis, une parole surgit qui frappe notre cœur, nos oreilles et on obéit à cette parole. Et d'un seul coup, c'est la lumière. Des possibilités émergent. Et le cours des choses prends un sens nouveau.

 Parfois, nous sommes dans la lumière de Dieu. Puis s'en trop nous en apercevoir, nous nous éloignons de cette lumière et nous réalisons après un certain temps que c'est la nuit. Il faut alors retrouver la clé de l'obéissance pour un nouveau jour de Dieu.

Parfois encore, nous pensons marcher dans la nuit parce que tout semble sec, tout semble fade, tout semble vide. Et pourtant Dieu est là. Et parce que nous croyons que Dieu est là et il est vraiment là. C'est la nuit de la foi d'une sainte Thérèse de Calcuta. D'autres enfin, plus rarement, comme l'enseigne saint Jeande la Croix passent par la « Nuit obscure », ce voyage intérieur vers la lumière divine pour atteindre la paix au-delà des épreuves et des souffrances de ce monde. Frères et sœurs, Que le Seigneur nous enseigne à fermer et à ouvrir avec les bonnes clés les chemins de notre vie. Amen.

Fr. Nathanaël