3° Dimanche de l'Avent (A) Mt 11, 2-11

Chers frères et chers amis, pourquoi sommes-nous ici ce matin ? C'est bientôt Noël et notre cœur est rempli de désir et d'attente. Nous espérons contre toute espérance. Comment cela ? Nous avons déjà beaucoup reçu et notre foi nous pousse à attendre encore davantage. « Ouvre large la bouche et je l'emplirai » nous dit un psaume. Et saint Paul affirme que « l'espérance ne déçoit pas parce que l'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint qui nous est donné. »

Chrétiens, nous sommes des êtres de désir mais comment vivre ce désir, garder ce désir sans l'édulcorer, sans chercher à le combler avec des ersatz ? La tentation est forte de vouloir en faire toujours plus à chaque fête de Noël, en cadeaux, en repas fastueux, comme nous y invitent les publicités à la télé, dans les magazines ainsi que les conversations entre amis et voisins. Et comme nous constatons que le désir n'est pas comblé, nous sommes entraînés dans la spirale du « toujours plus », ce « toujours plus » qui nous laisse à chaque fois encore plus vides et insatisfaits.

Noël : comment cette fête, comment la venue du Seigneur vient-elle combler notre cœur, notre attente, notre désir ?
Nous avons commencé cette messe en chantant : « réjouissez-vous, je le répète, réjouissez-vous ! » Qui nous dit cela ? Saint Paul, dont nous ne retenons bien souvent que la morale ou les spéculations théologiques… alors que saint Paul est par excellence l'apôtre de la joie. La joie est présente à chaque page de ses lettres, son cœur en déborde, même s'il ne la chante pas à la manière de Charles Trenet. Pour Paul, la joie est le signe distinctif du chrétien, la signature de la présence de Dieu, tout comme elle rayonne dans les évangiles depuis Noël jusqu'à l'Ascension : joie dans le ciel et paix sur terre ! chanterons-nous dans quelques jours.

Quand nous passons notre temps à dévorer la création, en nous gavant de ses biens, nous ne pouvons pas la chanter et chanter Dieu ! « Laudato si ! Laudato si ! Laudato si ! » répétait François le Poverello ! A Noël les anges se joignent aux pauvres pour chanter les merveilles de Dieu et François le Troubadour a inventé nos crèches - est-ce parce que les crèches sont le rappel de la venue de Dieu au milieu des pauvres que certains veulent les interdire ? - Joie simple et profonde de ce simple lumignon allumé pour éclairer la crèche familiale et illuminer le regard des enfants !
L'amour se nourrit de petits riens, de petits gestes, de petits mots, de légers sourires qui nous remplissent et nous creusent tout à la fois. Il suffit d'un rien pour faire éclater la joie.

Que signifie donc ce désir insatiable que nous portons en nous, désir incomblé qui nous comble ? Ce désir est la trace de la présence de Dieu en nous. Oui, paradoxalement Dieu est désir tout autant que plénitude. Désir et plénitude se résument en un mot : Dieu est amour !
Jésus est un homme de désir qui nous révèle le désir de Dieu son Père : « Je suis venu apporter le feu sur la terre et comme je voudrais qu'il soit déjà allumé ! » Mais Jésus nous montre le maximum de son désir au moment où il va donner sa vie : « J'ai désiré d'un grand désir manger cette Pâque avec vous » dit-il à ses disciples et l'une de ses dernières paroles est : « J'ai soif ! ». Aujourd'hui même, en cette eucharistie, Dieu nous dit et nous redit son désir de nous, son désir de partager la cène avec nous. Comprenons enfin que le désir de Dieu pour nous est plus grand que le désir que nous avons de lui !

La création, la beauté de la création, la venue du Fils de Dieu parmi nous, n'ont d'autre explication que le désir de Dieu. Noël, la naissance de Jésus au bout de la longue attente, n'a d'autre explication que le désir de Dieu de nous combler de son propre désir d'amour ! C'est ce qui fait dire à saint Paul : « Dieu, de riche qu'il était s'est fait pauvre pour nous enrichir de sa pauvreté. »
N'ayons donc pas peur du désir qui nous habite, ne cherchons pas à le tuer en croyant le combler. C'est ce qui fait dire à François Cheng : « L'accomplissement du désir c'est le désir lui-même ».
Oui, chrétiens nous sommes des êtres de désir : « Viens, Seigneur Jésus ! »

F. Pierre