19° Dimanche du TO*B Jn 6, 41-51

Dans les lectures de ce dimanche apparaît une thématique fondamentale pour la vie humaine, celle de la nourriture, du repas.
Dans la première lecture du 1er Livre des Rois, Élie, fuyant l'hostilité de la reine Jézabel, mange une galette et boit de l'eau. Dans l'évangile, Jésus s'affirme comme le pain de la vie, le pain vivant descendu du ciel. Si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement. Quant à saint Paul dans sa lettre aux Éphésiens s'il ne parle pas directement de repas, il invite, cependant, à nourrir sa conduite de générosité, de tendresse, de pardon et d'amour jusqu'à imiter Dieu et à éliminer amertume, irritation, colère, éclats de voix, insultes.

 La dimension naturelle du repas semble rejoindre une dimension spirituelle. Nous devenons ce que nous mangeons, c'est le principe même de l'alimentation naturelle qui fournit l'énergie nécessaire au processus physiologique de notre corps. Nos tissus, nos organes, notre sang sont en constante régénération tout en subissant une dégradation naturelle par le vieillissement, la maladie ou encore par accident. Ceci est vrai pour tout le vivant. Seulement, que faisons-nous de cette énergie absorbée ?

Élie, fuyant la Reine Jézabel après avoir fait tuer des prophètes de Baal et regrettant sa violence, veut s'endormir dans la mort car il ne vaut pas mieux que ses pères. Mais l'ange du Seigneur le touche et lui dit de manger. Dieu veut qu'il vive.

  Alors qu' Élie était alimenté d'un zèle violent pour le Seigneur, il découvre un Dieu qui le nourrit et va se révéler à lui dans le silence sur la montagne de l'Horeb dans une profonde expérience spirituelle et mystique. C'est que Dieu veut  le conduire vers une vocation plus haute, plus pure pour accomplir sa mission. Désormais, il agira différement. Il oindra Jéhu comme roi d'Israël qui mettra fin à l'idolâtrie du Baal et Élisée comme prophète pour lui succéder. Il aura le courage de revenir vers Achab et de dénoncer sa fourberie lorsque celui-ci fera tuer Nabot pour lui prendre sa vigne. Finalement, il sera soustrait au monde en étant élévé dans un char de feu.

Sommes-nous si différents d'Élie ? Comme lui, de par notre baptême, nous sommes prophètes. Comme lui, Dieu nous touche par son Fils Jésus et ses anges. Comme lui, il y a en nous des violences, des colères, des irritations. Mais, comme lui aussi, nous sommes nourris du pain de Dieu. Nous sommes abreuvés de son vin qui est sang du Christ. Comme lui, nous sommes appelés à transformer en miséricorde et en prière les lieux de nos colères et de nos hostilités. Comme Élie, nous sommes appelés à nous faire nourriture de paix, de justice et de vérité pour notre humanité et à nous faire pain d'espérance pour les désespérés .

 Par notre désir spirituel et notre conversion, nos vies peuvent changer pour devenir des sources de générosité, de tendresse et d'amour en un mot source de bénédictions. Notre vocation ultime est d'être élevé au ciel, d'être enlevé dans le char de feu de la résurrection de notre Seigneur pour vivre avec lui et avec l'humanité sauvée.

C'est bien ce à quoi nous prépare l'Eucharistie. Que faisons-nous en communiant au corps et au sang du Christ ? 

Certes, nous consommons du pain et du vin. À ce titre, ils participent à notre alimentation naturelle. Mais leur substance, leur essence, c'est Dieu lui-même, c'est Jésus-Christ. Dès lors, par la communion, acte d'adoration le plus élevé, nous sommes alimentés par notre Dieu. Il s'opère alors un processus spirituel un peu semblable au processus naturel mais avec cette différence, à savoir que ce qui est alimenté, c'est le cœur de l'homme nouveau qui peu à peu, pas à pas, grandit, croît, s'affermit pour faire disparaître le cœur corrompu du viel homme, dégradé, déchu qui aboutit à sa mort, celle du péché en lui. Jusqu'à ce que cette mort au péché coïncide alors avec la mort naturelle, celle de notre naissance en vie éternelle dans le Royaume. Nous devenons alors ce que nous aurons mangé ici-bas dans la foi, vivifiés de Dieu même. « Le pain que je donnerai, c'est ma chair, donnée pour que le monde ait la vie. » (Jn 6., 51b). Ainsi, puissions-nous manger le pain vivant du ciel dans ce monde pour devenir un jour offrande vivante à Dieu dans le monde à venir.

Fr. Nathanaël