4° Dimanche du TO*B Mc 1, 21-28

Chacun, chacune de nous, ici, a une histoire familiale, communautaire, affective, sentimentale, mais une histoire unique dans la grande histoire de l'humanité où Dieu est intervenu, où il agit pour nous sauver ; on l'appelle l'histoire du salut. C'est de cette histoire que nous parle la Parole de Dieu aujourd'hui.

À la fois unique et commune, cette histoire est marquée par une promesse de Dieu faite à Moïse (c'est notre première lecture) : « Je ferai se lever un prophète comme toi ; je mettrai dans sa bouche mes paroles, et il dira tout ce que je lui prescrirai… ». Cette promesse est réalisée pleinement en Jésus qui enseigne « en homme qui a autorité », promesse réalisée au delà de ce que pouvait imaginer Moïse, car Jésus non seulement a, possède la parole de Dieu, mais Il est la parole de Dieu faite chair. Il a donc en lui l'Esprit même de Dieu et c'est pourquoi il peut chasser les esprits mauvais, impurs…

Comment notre histoire personnelle, unique et commune, est-elle concernée, touchée par la parole de Dieu de ce dimanche ? À la fois en m'invitant à un combat et en m'apportant une espérance…

Un combat ? Jésus est le Bien, la Vérité, l'amour, la lumière, la Vie… Quand il paraît, il suscite la réaction des forces contraires opposées à ce qu'il est, un peu comme la lumière de ma lampe de bureau fait apparaître la poussière que l'obscurité cachait, ou comme la lumière fait apparaître la tache que je ne voyais pas sur mon vêtement…  Jésus est – passez moi le mot - le « condensé » unique et absolu de la présence de Dieu, de l'Amour, de l'Esprit de Dieu, mais caché aussi dans l'homme Jésus… Son contraire, l'esprit du Mal, le perçoit et se trouve débusqué. Du coup, cet esprit mauvais qui se tenait tranquille se met à crier : « Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais qui tu es : le Saint de Dieu… » Dans l'histoire de l'humanité, comme dans mon histoire personnelle, il y a, derrière les apparences, un combat secret entre la vérité et le mensonge, la lumière et les ténèbres, le bien et le mal, l'amour et la haine… Nous terminons le premier mois d'une nouvelle année et notre humanité continue à se déchirer… Derrière la guerre, derrière le combat des hommes  en Ukraine, en Israël et en Palestine il y a la puissance du Mal, l'esprit du mal qui se déploient, qui agissent… l'action de « Celui dont Jésus dit dans l'évangile qu'il peut tuer l'âme et le corps, et que nous devons le craindre… » Si, en Europe comme sur toute la planète, nous oublions cela, c'est à dire la transcendance de ce combat, ce combat entre l'Esprit d'amour de Dieu et l'esprit du Mal, nous risquons de n'apporter que des remèdes partiels à la guerre totale qui, aujourd'hui, se mène contre la démocratie et ses valeurs…Et chacun de nous peut se dire aussi : jusqu'à mon dernier souffle, dans ma propre vie, j'aurai à lutter dans le secret de mon cœur entre vérité et mensonge, amour et haine, etc…, ce combat quotidien qu'évoque St Paul dans la deuxième lecture, tension, combat entre le souci des affaires de ce monde et le souci des affaires du Seigneur…

Mais ce combat même est source d'espérance… Dans l'évangile l'esprit mauvais révèle Dieu caché en l'homme Jésus : « Tu es le Saint de Dieu » … De même lorsque nous voyons se déchaîner les forces du Mal, croyons-nous assez que derrière l'assaut du Mal, l'Esprit de Dieu, le plus fort agit dans le secret et est capable, comme Jésus, de chasser l'esprit mauvais, l'esprit du mal… L'Esprit d'amour, de vérité, de paix, ne fait jamais grève, n'est pas au chômage dans l'histoire présente de l'humanité. En ce moment même, derrière les guerres terribles qui déchirent notre monde, s'il n'y avait pas, dans l'humanité, plus d'amour que de haine, si l'Esprit de Dieu ne travaillait pas le cœur des hommes, déjà l'humanité n'existerait plus, la fin de l'humanité aurait eu lieu… Le croyons nous ? C'est dans cette action de l'Esprit de Dieu, manifesté en Jésus, qu'est notre espérance, tant pour notre vie personnelle que pour l'histoire de l'humanité… Seulement cette présence, cette force de l'Esprit Saint veut aujourd'hui passer par nous… Ma personne est cet espace consenti à Dieu, comme une humanité de surcroît, pour le combat de la vie sur la mort, de la lumière sur les ténèbres, de la vérité sur le mensonge, de l'amour sur la haine…

Alors la seule question qui m'est posée : « Suis-je assez attaché au Christ Jésus, pour ne faire qu'un avec lui, pour que ma vie lui soit une humanité de surcroît » ?  Paul le dit dans la seconde lecture : « …Soyez attachés au Seigneur sans partage. » Nous convertir, ce n'est pas adapter le christianisme aux hommes, mais adapter les hommes au Christ Jésus. Pour notre combat et pour espérer, le Seigneur nous attire sans cesse comme l'aimant attire et ramasse la limaille de fer, à condition cependant qu'elle soit dans le champ d'attraction, dans le champ magnétique. Il est donc demandé à ma liberté de se tenir dans le champ d'attraction ; comment ? En écoutant la Parole du Seigneur, en essayant d'aimer et de servir le prochain, en priant le Seigneur chaque jour, comme nous l'avons demandé dans la prière d'ouverture, « Accorde-nous, Seigneur, de pouvoir t'adorer de tout notre esprit et d'avoir envers tous une vraie charité » … Amen !

P. André-Jean