22° Dimanche du TO*B Mc 7, 1-8.14-15.21-23

Frères et sœurs, et si les pharisiens et les scribes avaient raison ? Et si les disciples de Jésus avaient tort de ne s'être pas lavé les mains avant le repas ? Bien sûr, il ne s'agit pas de se protéger des virus, mais d'un rite symbolique, une ablution rituelle. En fait, en commençant le repas par le lavement des mains, les Juifs entraient dans un espace sacré, un espace avec Dieu, en laissant derrière eux ce qui est mauvais ou sale. Oui, visiblement, les disciples sont croyants, mais pas pratiquants ! Et en plus Jésus les défend !

À vrai dire, les disciples sont déjà en présence de Dieu, ils sont avec Jésus qui est homme et Dieu. Ils n'ont pas besoin de marquer des frontières entre le profane et le sacré, car le Saint, Dieu, est au milieu d'eux. Dans sa réponse aux pharisiens, Jésus nous montre que Dieu cherche d'abord une relation authentique avec nous, en esprit et en vérité, et non la perfection dans l'accomplissement des rites ou des coutumes, même le plus symboliques.

Les pharisiens et les scribes ont été très scrupuleux, voire obsédés par des lois, des prescriptions, des coutumes. Pourquoi ? Peut-être, parce qu'ils croyaient que pour être un bon croyant, pour plaire à Dieu, pour être aimé par lui, il fallait être parfait dans l'observance de la moindre coutume, ou au moins faire semblant, devant les autres, des inférieurs, devant ceux qu'ils critiquaient et méprisaient. Leur image de Dieu pose question, car elle les pousse à faire du mal aux autres et à eux-mêmes. Jésus cherche à les aider à changer cette fausse image de Dieu, de la foi et d'eux-mêmes. Il est clair : pas besoin de se faire violence pour atteindre un idéal imaginaire pour plaire à Dieu, pour être aimé par lui. Dieu ne cherche pas des hommes irréprochables, des supermans, mais des hommes réels, qui entrent en relation avec lui, comme les disciples avec Jésus.

Et les rites ? Les rites sont comme un doigt qui montre la Lune : il ne s'agit pas de regarder le doigt, mais la Lune. Dans le rite, il ne s'agit pas de se contempler soi-même dans la manière parfaite de l'accomplir (à la différence des autres), mais il s'agit de contempler le Seigneur. Si un rite ne nous mène pas à la contemplation de Dieu, à une relation cordiale avec lui, nous pouvons l'abandonner ou au moins nous interroger. Et cela ne veut pas dire abandonner Dieu. P.ex. si notre façon de prier ne nourrit plus notre relation avec le Seigneur, nous pouvons trouver une autre manière de prier, oser autre chose. Il n'y a pas de rite absolu. Même la célébration de l'Eucharistie n'est pas un rite absolu. Et il n'est pas le même partout : p.ex. dans l'anaphore d'Addaï et Mari de l'Église assyrienne d'Orient, reconnue par le Saint Siège, il n'y a pas de récit de l'Institution avec les paroles du Christ « Ceci est mon corps ; ceci est mon sang », alors que dans notre rite, il est présent et parfois considéré comme central. Le rite n'est pas le but en lui-même. C'est la relation avec le Seigneur qu'il vise.

En répondant aux pharisiens, Jésus dit une autre chose très importante : « Rien de ce qui est extérieur à l'homme et qui entre en lui ne peut le rendre impur. Mais ce qui sort de l'homme, voilà ce qui rend l'homme impur. » Jésus déclare ici que la matière est bonne, qu'elle n'a pas de pouvoir de nous rendre mauvais. La nourriture ne peut pas nous rendre méchants, orgueilleux ou nous pousser à voler ou trahir un ami. Tout cela commence dans notre esprit, dans nos pensées. C'est nous qui sommes responsables de ce que nous pensons, de ce que nous faisons ou pas, y compris avec la matière, avec la création, avec des symboles ou des rites.

Les pharisiens et les scribes reprochent aux disciples de Jésus de manger avec les mains impures. Eux-mêmes ont, certes, les mains purs, lavés rituellement, mais qu'en est-il avec leurs cœurs, avec leurs pensées et surtout avec leurs langues ? Le rite du lavement des mains ne serait-il pas pour eux un moyen facile de se laver, de se déresponsabiliser (comme Pilate après avoir condamné Jésus à mort), d'avoir un sentiment d'une conscience tranquille ?

Frères et sœurs, les pharisiens et les scribes auraient raison de critiquer la non pratique des disciples de Jésus, si Jésus n'était pas Dieu, s'il n'était pas la Loi lui-même et si le rite était un but en soi. Les disciples ont choisi la meilleure part, ils ont choisi la relation proche avec Jésus. Ils ont choisi la personne du Christ. Ils ont choisi la liberté d'être aimés de Dieu gratuitement, tout en restant responsables de leurs pensées et de leurs actes. Ils ont accueilli la Parole de Dieu, la Parole de vie semée en eux, la Parole (c'est-à-dire Dieu) qui purifie et qui libère. Faisons de même.

Fr. Maximilien