1° Dimanche de l'Avent (C) Lc 21, 25-28.34-36

Frères et sœurs, le moment de l'année liturgique que nous vivons, en ce premier dimanche de l'Avent, est comme un nœud, une boucle que l'on fait à un fil, pour en attacher les deux extrémités, le commencement et la fin. Fin d'un monde et d'un cycle, et début de quelque chose de nouveau qui est en train de naître, de germer. Un Germe, le Christ, vient jusqu'à nous, et il nous promet la délivrance, la libération de toute forme d'oppression et d'injustice. Dans ce passage d'évangile que nous avons entendu, il nous est présenté une apocalypse, ce qui signifie une « révélation », un « dévoilement ». Qu'est-ce qui est révélé ? Un monde nouveau approche et va se manifester, en même temps qu'un autre s'effondre. Dès lors, nous pouvons nous demander : Qu'est-ce qui doit mourir en moi, mais aussi dans le monde, pour que ce germe apparaisse ?

Le style apocalyptique, présent à la fin des évangiles ainsi que dans le dernier livre du nouveau testament, reprend une forme littéraire héritée du prophétisme en Israël. Des hommes dénoncent l'idolâtrie et l'infidélité du peuple élu. Une catastrophe doit s'abattre, afin de laisser place à une conversion et à un retour authentique vers Dieu. Ce style apocalyptique est marqué par les symboles. Les signes dans le ciel - que sont le soleil, la lune et les étoiles - sont les éléments du monde qui ont longtemps eu tendance à être adorés par les hommes. Les puissances mondaines de l'argent et du pouvoir, qui sont à l'œuvre dans notre société, sont en quelque sorte la réplique des faux dieux adorés autrefois par le peuple d'Israël. La tentation de l'idolâtrie et de l'idéologie sont récurrentes dans l'histoire de l'humanité, et malheureusement aussi dans toutes les traditions religieuses. Aujourd'hui, des personnes ont encore recours à des pratiques magiques ou occultes, dans lesquelles elles trouvent une forme de puissance. Elles pensent naïvement que le divin peut se maîtriser et se plier à leurs désirs. Mais le vrai Dieu ne peut pas être tenu en laisse, ni être soumis. Lui seul est le Maître du temps et de l'histoire, et il fait chuter tous ces éléments, nous dit l'évangile. Dieu est inconnaissable, et celui qui prétend le connaître ou prévoir l'avenir se trouve complètement dans l'erreur ; car le Christ nous révèle la nature du Père, mais il nous le cache en même temps, par le voile de son humanité.

Si nous regardons le monde tel qu'il est aujourd'hui, il paraît plus que jamais en crise, à plusieurs niveaux : économique, écologique, politique, etc. Jésus nous fait comprendre que ce passage de la mort à la vie, il l'a lui-même traversé pour nous introduire à la vie divine. La chute du monde ancien est nécessaire, pour permettre l'émergence d'un monde nouveau, où règne la justice et la paix. De tous temps, le monde a été en crise, en travail d'enfantement. L'homme ne cesse de grandir, et de se déployer dans ses activités, ses capacités inventives et technologiques. Tout cela lui permet de s'affranchir de la mort et de la souffrance. Le problème est qu'à trop vouloir progresser, et à vouloir grandir trop vite, en se séparant de Dieu, la promesse de libération se transforme en nouvel esclavage. Nous voyons bien que la technique nous rend libre jusqu'à un certain point, elle nous permet de combler nos besoins, mais elle ne nous rend pas heureux. Elle ne satisfait pas notre désir le plus profond. Seul Dieu peut opérer une telle transformation intérieure, et peut nous promettre un tel bonheur.

Frères et sœurs, que nous dit le Christ ? Il nous demande de rester éveillés, debout, et non pas endormis et alourdis par les soucis et les plaisirs de la vie. En ces temps troublés, où l'on ne sait pas trop ce que nous réserve l'avenir, il nous faut être vigilants et attentifs à ce qui germe dans le monde, et à ce qui est promesse de vie. Le film documentaire « Demain » - sorti il y a quelques années - est à ce titre une très bonne illustration, car il nous invite à ne pas nous lamenter sur cette situation catastrophique, mais à chercher quelles sont les alternatives possibles, afin de construire un monde plus humain et plus juste. Non pas un monde idéal, mais un monde qui tient compte du réel et de la fragilité humaine. C'est en nous tenant prêts que nous pourrons faire face à ce qui vient. En étant dans une position de ressuscités, avec le Christ qui triomphe de toute forme de mort et d'oppression. En tant que croyants, nous sommes invités à vivre dans l'espérance et l'attente d'un surcroît d'humanité. Pour cela, Jésus nous demande de prier en tout temps, afin de ne pas entrer en tentation, et d'être jugés dignes d'échapper à ce qui arrive, non pas pour être comme des privilégiés, mais pour pouvoir agir devant cette situation de crise, la tête froide et avec raison, sans se laisser guider par la seule émotion. Que Dieu nous rende attentifs aux mouvements de son Esprit à l'œuvre dans le monde, et qu'il nous ouvre les yeux aux promesses de vie qui germent çà et là, dans les petites actions apparemment insignifiantes. Qu'il fasse de nous de véritables ressuscités en son Fils. Amen.

Fr. Columba