2° Dimanche de l'Avent (A) Mt 3, 1-12
Frères et sœurs, avez-vous prêté attention à ce que dit Paul aux chrétiens de Rome dans la seconde lecture : « tout ce qui a été écrit à l'avance dans les livres saints l'a été pour nous instruire, afin que, grâce à la persévérance et au réconfort des Écritures, nous ayons l'espérance ».
Et nous en avons besoin dans ce que vit notre Église en ce moment.
Celles et ceux d'entre nous qui travaillent, creusent, goûtent, mâchonnent la Parole de Dieu – par exemple l'Évangile du dimanche durant toute la semaine – le savent bien : la Parole de Dieu donne réconfort, persévérance et espérance.
Sachant aussi qu'il y faut de la persévérance et parfois du courage pour s'y mettre ! Cela, les moines le savent bien, eux qui ont un long temps chaque jour avec la Parole de Dieu : et pourtant, ce n'est pas toujours facile ; c'est parfois un combat !
Expérimentons ensemble – pour nous encourager – ce que dit Paul, avec les lectures de ce jour.
Reprenons la première lecture, avec l'annonce d'un rameau de Jessé et d'un monde où « il n'y aura plus de mal ni de corruption ». Texte magnifique ... mais donne-t-il vraiment courage et espérance ? N'est-il pas au contraire quelque peu désespérant pour nous qui proclamons que le rameau de Jessé, le Messie, c'est Jésus de Nazareth ? Car si vous parlez du Messie avec un croyant juif, il vous dira que les signes de la venue du Messie ne se sont pas manifestés et que le Messie n'est pas encore venu.
Il faut nous donc chercher, creuser, chercher le sens possible de ce texte d'Isaïe. La réponse ne sera pas immédiate. Acceptons d'attendre et de croiser la question avec l'itinéraire de vie de Jean-Baptiste et avec la liturgie de l'Avent.
Commençons par Jean-Baptiste. « En ces jours-là paraît Jean le Baptiste ». Nous lisons cela habituellement comme une vague introduction, mais l'évangéliste Matthieu met beaucoup de solennité dans ces quelques mots. Dans un oratorio, on aurait des trompettes et des sonneries de cor en rafale, puis un long silence déchiré par le rugissement d'une voix de basse. Et du fond de la scène entrerait lentement le Prophète des temps nouveaux, le Prophète rugueux, dont la parole est exigeante, à la mesure de ce qu'il annonce.
Et voilà que la liturgie nous invite à lire l'itinéraire de Jean le Baptiste, aujourd'hui, et dimanche prochain avec le texte – si déroutant et tellement important – des doutes profonds de Jean-Baptiste en prison. Mais comme je ne veux pas couper l'herbe évangélique sous les pieds du prochain prédicateur, je glisse tout de suite à la mort de Jean-Baptiste au chapitre 14 de Matthieu. Allez lire le texte, frères et sœurs : une mort idiote, à cause de la cruauté d'une femme, de la pusillanimité de sa fille et du manque de courage d'Hérode. Une telle mort est-elle digne du grand Prophète ? Et à quoi sert l'entrée solennelle de l'Évangile de ce jour, puisque Jean-Baptiste doute si profondément, et meurt d'une mort idiote ensuite ?
Jean-Baptiste est le Précurseur. Précurseur pour l'entrée solennelle, puisque Jésus – à la fin du chapitre 3 de Matthieu – a droit à la même entrée majestueuse, au moment où il va vers Jean pour être baptisé.
Jean-Baptiste est Précurseur aussi pour les heures sombres de Jésus à Gethsémani et au Golgotha. Précurseur enfin pour la mort indigne du Sauveur.
Nous voici donc devant le mystère du Christ ; pas devant la réponse facile à toutes nos questions, mais devant le mystère du Christ, que l'année liturgique nous invite à re-parcourir. Le mystère d'un Royaume qui est concentré en la personne du Christ ; le mystère d'un Royaume qui se réalise dans la personne du Christ.
Et que nous dit la liturgie de l'Avent ? La préface contient une perle précieuse : « il est déjà venu, en assumant l'humble condition de notre chair » ; « il viendra de nouveau, revêtu de sa gloire » et sous-entendu dans la concision de la langue latine : il vient maintenant.
Car l'Avent n'est pas seulement la préparation de Noël, c'est la préparation à la triple venue du Seigneur : Il est déjà venu, Il vient maintenant, Il reviendra dans la Gloire.
Alors le sens de l'oracle d'Isaïe, dans la première lecture, s'éclaire. Car en Jésus Ressuscité advient ce qui est attendu pour la fin des temps : en Lui totalement dans Sa résurrection, et pour nous comme une promesse assurée. Ainsi, le monde pacifié où rien ne se fait de mal est pour le monde à venir, le monde vers où nous allons. C'est pourquoi, dimanche dernier, nous avons commencé l'Avent avec un Évangile sur la fin de l'histoire, tiré de la fin de l'Évangile de Matthieu.
Alors, frères et sœurs, puisque la liturgie nous fait ainsi voyager dans l'Évangile de Matthieu, je vous propose de lire deux fois l'Évangile de Matthieu dans son ensemble durant cette année liturgique. Une fois sans trop approfondir et une autre fois en vous aidant des notes de votre Bible. Et lisez entre vos deux lectures l'introduction à l'Évangile de Matthieu.
Frères et sœurs, quand nous lisons, approfondissons et prions la Parole de Dieu, c'est une venue du Seigneur en nous. La Parole de Dieu est là « pour nous instruire, afin que, grâce à la persévérance et au réconfort des Écritures, nous ayons l'espérance ».
Notre fréquentation assidue de la Parole de Dieu ne serait-elle pas un fruit qui atteste concrètement de notre conversion ? Et nous pousse à entrer plus avant dans cette conversion pour qu'elle porte véritablement des fruits ?
Fr. Jean-Jacques