2° Dimanche de Pâques (de la Divine Miséricorde) Jn 20, 19-31

Frères et sœurs, nous connaissons tous des histoires des princesses enfermées dans de hautes tours, dans des donjons, des princesses qui désirent d'être sauvées par un preux chevalier. Et, effectivement, souvent elles sont délivrées par des princes charmants, des chevaliers blancs ou des dragons adorables. Elles finissent parfois par trouver elles-mêmes une clé, par creuser un tunnel ou par grimper sur un nuage et s'en sortir.

Les disciples de notre évangile, enfermés dans une pièce, ne sont pas si désireux que cela de s'en sortir, de sortir de leur « tour », alors qu'ils doivent avoir une clé. Seul Thomas n'est pas là. Il a dû sortir, peut-être pour acheter quelque chose à manger.

Les portes sont verrouillées de l'intérieur. Les disciples ont peur des Juifs. Ce qu'ils désirent, c'est la paix, la sécurité, c'est sortir de la peur et de la confusion, c'est d'être pardonnés et accueillis par des Juifs qui leur en veulent parce qu'ils étaient les disciples de Jésus. Ils désirent sans doute de tourner la page, passer à autre chose, avoir tout cela derrière eux et vivre tranquillement, comme tout le monde, reprendre leurs métiers. Ils désirent, et pourtant, ils restent paralysés, figés, passifs, enfermés. Ils attendent peut-être que la tempête passe ou qu'un prince les libère.

C'est alors que vient Jésus, malgré les portes fermées, et il se met au milieu d'eux. Comme l'arbre de vie qui a été au milieu du jardin d'Eden, Jésus se plante au milieu de ses disciples. Il est le nouvel arbre de Vie. Par sa présence, il transforme ce lieu de mort et de peur en paradis nouveau, en jardin d'Eden. Les disciples peuvent cueillir des branches de ses bras et de ses mains blessées des fruits, goûter la paix, la vie, la joie, la compassion, la miséricorde. Jésus leur dit alors : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m'a envoyé, moi aussi, je vous envoie. »

Huit jours plus tard, ils sont toujours là, toujours enfermés, dans la même « tour ». Ils ont vu le Ressuscité, ils ont reçu la paix, ils ont reçu l'Esprit Saint, ils ont été envoyés en mission par Jésus… Huit jours plus tard, ils n'ont pas bougé d'un centimètre. Qu'est-ce qui les empêche de sortir, de bouger, d'annoncer le Christ ressuscité, la miséricorde de Dieu ? C'est la porte. C'est la porte fermée qui les protège et en même temps les coupe de la liberté, de l'espérance, du sens de leur vie.

Frères et sœurs, et pour nous, quelle est cette porte à la fois protectrice et emprisonnant qui nous coupe de la vie, de l'espérance, de la liberté, et qui nous donne peut-être envie de nous jeter du haut de la tour ? C'est peut-être notre passé ou nos émotions (peur, culpabilité, colère, jalousie, impuissance), des pensées qui tournent en boucle, des doutes, des deuils inachevés, de petites voix accusatrices qui nous disent : « Tu n'es pas assez ceci, tu es trop cela, tu devrais, tu aurais dû, ta vie est médiocre » ?

Frères et sœurs, comme pour ses disciples, le Christ vient chez nous, au milieu de nous, dans notre cœur, et il nous parle, il nous donne sa paix et son Esprit. Il entre vulnérable, avec ses blessures pour nous rejoindre dans nos blessures. Comme cet arbre de Vie, il nous donne à manger les fruits de son corps et de sa parole.

Jésus ne déverrouille pas la porte fermée, mais elle ne l'empêche pas d'entrer et de sortir. Il vient autant de fois que c'est nécessaire, sans reproches : il ne juge pas Thomas qui a des doutes, il ne critique pas les apôtres peureux. Il leur permet d'accueillir la nouvelle Vie dans leur vie, à leur rythme et à leur façon. Un jour, quand c'était bon pour eux, ils ont déverrouillé la porte eux-mêmes et ils sont sortis. Cependant, ils ne se sont pas précipités pour annoncer la Résurrection du Christ et le pardon des péchés. Non, ils ont suivi Pierre qui est revenu dans son ancien métier de pêcheur. Et de nouveau, le Christ leur a apparu, il leur a donné sa parole, il leur a donné à manger.  

Frères et sœurs, nous sommes tous de temps en temps comme des princes ou des princesses enfermés dans nos tours de peur, de solitude, de désespoir, de non-sens ou d'orgueil. Le Christ ne vient pas toujours à la façon d'un chevalier blanc pour nous libérer, mais discrètement, sans ouvrir la porte. Il vient encore et encore. Il nous accompagne sur notre chemin, comme il l'a fait pour ses disciples. Il ne renonce jamais à nous, car, comme nous l'avons chanté dans le psaume, éternel pour nous est son amour.

fr. Maximilien