Dédicace de l'église Lc 19,1-10

1 R 8,22-30 ; 1 P 2,4-9 ; Lc 19,1-10

Jésus est en route vers Jérusalem. Il monte pour rejoindre la ville sainte, où il sera bientôt acclamé par la foule en liesse, et il rencontre d'abord un aveugle, Bartimée, en s'approchant de Jéricho. Puis, entré dans Jéricho, il voit Zachée, dans son arbre, qui cherche à le voir. Ces deux hommes sont exclus de la société. L'un, parce qu'il est aveugle, et donc pauvre, obligé de mendier. L'autre parce qu'il est collecteur d'impôts, et qu'il se fait de l'argent sur le dos de la population. Tous les deux sont à la recherche d'une vie meilleure, d'un salut. Tous les deux veulent sortir de l'obscurité dans laquelle ils évoluent, pour des raisons différentes. En montant à Jérusalem, Jésus glane sur son chemin des cailloux informes, comme autant d'hommes et de femmes cabossés et polis par les épreuves, et il en fait des pierres vivantes qui seront destinées à être rassemblées pour former la cité sainte, la Jérusalem nouvelle, faite de pierres précieuses et choisies par Dieu.

Le Christ est la pierre d'angle du Temple, celle qui fait l'unité entre toutes les pierres vivantes que nous sommes, chacune avec ses particularités blessées. Nous sommes à l'image de cette pierre d'angle qui a été rejetée par les hommes. Jésus nous prévient : Le disciple n'est pas au-dessus de son maître. Si le Christ a été rejeté, ses disciples aussi le seront. Rien d'étonnant alors, que les hommes qu'il choisit soient des exclus, des parias. Et nous voyons bien que ce n'est pas une question de richesse. Matthieu et Zachée, bien que riches, sont pauvres. Ils sont exclus, comme les pauvres. Cela nous amène à dire, comme l'apôtre Pierre dans la première lecture, que notre valeur ne peut venir que de Dieu. C'est lui qui nous choisit. En son Fils, il fait de nous des élus. Non pas à cause de nos mérites, mais parce que nous sommes des pauvres. C'est là le lot des disciples. Saint Paul dit : Considérez, frères, qui vous êtes, vous qui avez reçu l'appel de Dieu : il n'y a parmi vous ni beaucoup de sages aux yeux des hommes, ni beaucoup de puissants (…) ; ce qui est faible dans le monde, Dieu l'a choisi pour confondre ce qui est fort ; ce qui dans le monde est vil et méprisé, ce qui n'est pas, Dieu l'a choisi pour réduire à rien ce qui est (1 Co 1,26-28).

Cette conviction d'être pauvre n'a rien à voir avec du misérabilisme. C'est au contraire un facteur de joie pour Zachée qui accueille Jésus dans sa maison. Le publicain sait qu'il n'est pas digne de recevoir le maître, mais il consent à l'appel de celui-ci. Il a conscience, comme le roi Salomon, que sa maison, comme la terre et le ciel, ne peut contenir l'Esprit de Dieu qui est partout présent. Est-ce que vraiment Dieu habiterait sur la terre ? Pourtant, c'est bien ici que Jésus veut demeurer. C'est ici que sera mon nom, dans cette maison. Le Christ veut mettre son empreinte, son sceau royal dans notre vie, en choisissant de venir parmi nous, dans notre pauvreté. Et il nous faut l'accueillir pour être digne de lui. Ce n'est pas la peine de passer son temps à chercher à être digne, à s'élever comme le fait le petit Zachée en montant dans un arbre. C'est Dieu qui nous rend digne en venant chez nous. Pensons à cela, quand nous communions à l'eucharistie, et que nous disons : « Je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri ». Celui que nul ne peut contenir se fait pauvre pour nous enrichir de sa pauvreté, et pour nous donner une valeur inestimable. C'est alors que nous pourrons, comme Zachée, faire don aux pauvres de la moitié de nos biens, qui viennent de Dieu.

Rendons grâce à Dieu pour ce mystère insondable, et accueillons-le avec joie dans la demeure de notre cœur. Il est venu chercher et sauver ce qui était perdu. Amen.

Fr. Columba