Sainte Trinité Mt 28, 16-20
Pour accueillir le Mystère de la Trinité dans son impact si important pour chacune de nos vies, il me semble que, le plus simple et le plus important pour chacun de nous, ici présents, est de partir d'un témoignage spirituel qui puisse remettre en question notre manière d'accueillir la Trinité et donc l'Amour de Dieu dans nos vies de tous les jours ! C'est vrai pour chacune et chacun de nous ici présents, laïcs tout autant que prêtres et religieux !
Dans ce but, je vous propose d'écouter le témoignage d'une jeune femme qui naquit en 1880 et entra à 21 ans au carmel de Dijon ! Elle y mourut peu de temps après, en 1906, à 26 ans : il s'agit d'Elisabeth de la Trinité qui a été canonisée, il y a quelques années ! Je voudrais laisser Elisabeth nous livrer quelque chose de son témoignage d'amour de la Sainte Trinité, autrement dit : son amour personnel de Dieu qui est Père-Fils et Esprit ! L'amour de Dieu, l'amour de Jésus, est tout à fait central dans l'expérience d'Elisabeth. Je la cite, il s'agit d'une lettre à une amie : « Il est mon Ami de tous les instants. Il est mon Infini, en Lui, j'aime, je suis aimée et j'ai tout. Ne crois-tu pas que lorsque le cœur est captivé par le Christ, il ne puisse alors se livrer jusqu'au bout ? » A une autre amie, elle confie où elle puise ses forces et lui conseille de faire de même : « Je vais vous dire comment je fais lorsqu'il y a une petite fatigue : je regarde le Crucifié et quand je vois comment Lui s'est livré pour moi, il me semble que moi, je ne puis moins faire pour Lui que de me dépenser, et m'user, pour Lui rendre un peu ce qu'Il m'a donné !....Si nous sommes fidèles à vivre de Sa Vie, si nous nous identifions à tous les mouvements de l'âme du Crucifié, tout simplement, alors nous n'avons plus à craindre nos faiblesses, car Lui sera notre force. »
Trois semaines avant sa mort, au milieu de grandes souffrances, elle révèle dans une dernière lettre à sa mère le secret qui fit de sa jeune vie une seule flamme d'amour : « Il y a un être qui est l'Amour et qui veut que nous vivions en société avec Lui. Il est là qui me tient compagnie, qui m'aide à souffrir, qui me fait dépasser ma douleur pour me reposer en Lui ; fais comme moi, tu verras comme cela transforme tout. »
Il est une autre donnée qui peut nous étonner, le message d'amour et d'intériorité d'Elisabeth de la Trinité semble être d'abord et comme de préférence adressé aux laïcs ! Ecoutons-la raconter à sa sœur Guite, jeune femme mariée, mère de 2 enfants (elle en aura neuf) sa joie de se savoir enfant de Dieu – je la cite- « Je viens de lire dans saint Paul des choses splendides sur le mystère de l'adoption divine. Naturellement, j'ai pensé à toi, ce serait bien extraordinaire qu'il en fut autrement : toi qui es mère et qui sais quelles profondeurs d'amour le Bon Dieu a mises en ton cœur pour tes enfants, tu peux saisir la grandeur de ce mystère : enfants de Dieu, ma Guite, est-ce que cela ne te fait pas tressaillir ? Ecoute parler mon cher saint Paul : 'Dieu nous a élus en Lui, avant la création. Il nous a prédestinés à l'adoption des enfants pour faire éclater en nous la gloire de sa grâce », c'est-à-dire qu'en sa toute-puissance il semble ne pouvoir rien faire de plus grand »
A l'exemple de Jésus, Elisabeth voit le cœur de l'amour dans l'obéissance à la volonté concrète du Père. « Aimer, c'est si simple, dit-elle, c'est se livrer à toutes ses volontés, comme Lui s'est livré à celles du Père ». « Le bonheur de mon Maître suffit pour faire le mien, et je me livre à Lui pour qu'Il fasse en moi tout ce qu'Il désire. » « Chaque incident, chaque évènement, chaque souffrance comme chaque joie est un sacrement qui me donne Dieu. »
Ecoutons encore ses témoignages et ses conseils. Parlant de Dieu, elle écrit : « Je le sens si vivant en mon âme, je n'ai qu'à me recueillir pour le trouver au-dedans de moi, et c'est cela qui fait tout mon bonheur. Il a mis en mon cœur une soif d'infini et un si grand besoin d'aimer que Lui seul peut rassasier : alors je vais à Lui, comme le petit enfant à sa mère, pour qu'Il comble, qu'Il envahisse tout, et qu'Il me prenne et m'emporte en ses bras ; il me semble qu'il faut être si simple avec le Bon Dieu ! »
Sa prière est tout imprégnée de cette expérience qu'habite en nous l'Esprit de Jésus qui prie sans cesse. Je la cite encore : « Il me semble que ma prière est toute puissante, car ce n'est pas moi qui prie, mais mon Christ qui est en moi! » « C'est si simple, le divin Adorant est en nous, donc nous avons sa prière, offrons-la, communions-y, prions avec son Ame ! » « l'Esprit-Saint crée le Ciel en toi ».
Elisabeth est consciente de la présence d'un Amour sauveur, premier, gratuit, prévenant, et elle reste fidèle à se laisser aimer A une jeune fille, elle écrit : « Je sens tant d'amour sur mon âme… Il est en moi, je suis en Lui, je n'ai qu'à L'aimer, qu'à me laisser aimer, et cela tout le temps, à travers toutes choses : s'éveiller dans l'Amour, se mouvoir dans l'Amour, s'endormir dans l'Amour, l'âme en son âme, le cœur en son cœur, les yeux en ses yeux, afin que par son contact Il me purifie, Il me délivre de ma misère. »
A sa propre maman, Elisabeth conseille de libérer chaque jour un peu de temps pour Dieu et de faire « trois oraisons de cinq minutes » : « Pense que tu es avec Lui, et agis avec un Être qu'on aime ; c'est si simple, pas besoin de belles pensées mais un épanchement du cœur »… « Si tu préfères penser que le Bon Dieu est près de toi plutôt qu'en toi, suis ton attrait pourvu que tu vives avec Lui. » « Demeurez en moi… C'est le Verbe de Dieu qui donne cet ordre, qui exprime cette volonté. Demeurez en moi, non pas quelques instants, quelques heures qui doivent passer, mais demeurez d'une façon permanente, habituelle. Demeurez en moi, priez en moi, adorez en moi, travaillez, priez en moi. Demeurez en moi pour vous présenter à toute personne, ou à toute chose, pénétrez toujours plus avant en cette profondeur. »
C'est ainsi qu'Elisabeth de la trinité fait écho au conseil de Jésus et de St Paul sur la prière continuelle, qu'elle nous y encourage et nous y éduque. Elle-même ne voulait plus rien être sinon « une louange de gloire » de Dieu. Il n'est pas de prière chrétienne sans une mort à soi-même, à la suite du Christ en son mystère pascal. Laissons-nous faire par Lui et laissons-Le faire en nous ! Amen !
F. Jean-Marie