Le Baptême du Seigneur (B) Mc 1, 7-11

Lorsque Jean-Baptiste baptise dans le Jourdain, il annonce celui qui va venir et qui baptisera dans l’Esprit-Saint et dans le feu.

Tout ce que peut faire Jean, c’est de prendre de l’eau entre ses mains et de la répandre sur ceux qui veulent se convertir…

Or, celui qui est venu allumer ce feu est soudain là, devant Jean, confondu parmi les pécheurs.

Jésus a pris place dans la longue lignée des hommes et de femmes qui attendaient leur tour pour se laisser plonger dans les eaux du Jourdain. Rien ne le distinguait des autres.

Anonyme, il se mêle à nous, peuple de pécheurs en attente que nous sommes. Il s’enfonce profondément et discrètement dans la pâte humaine. Dans l’Evangile de Luc, il est même baptisé en dernier, après tout le peuple comme pour prendre dans ses bras toute l’humanité avec ses grandeurs et ses crimes, avec ses générosités et ses folies.

Jésus est là, incognito, il a écouté Jean-Baptiste dire « Convertissez-vous ». Lui qui n’a jamais pêché, est là, mêlé aux hommes, assimilé aux hommes.

Par son baptême, Jésus a voulu se lier à ces publicains et pécheurs venus au Jourdain pour être lavés de leurs péchés. Il est là au milieu du peuple, lui, qui n’a jamais péché.

Sa place serait au Temple de Jérusalem et pourtant il est là au milieu des hommes pécheurs. Il se dessaisit de sa différence pour devenir notre prochain, pour se donner à nous.

Le ciel s’ouvre…

Le ciel s’ouvre cela signifie que l’attente millénaire de l’humanité se trouve comme accomplie, comblée. Depuis qu’Adam a été chassé du paradis, l’homme est séparé de Dieu. Le baptême de Jésus est l’heure où la brèche s’ouvre. Le ciel fermé depuis le premier péché se déchire enfin, et l’auteur de ce geste c’est le Père. Si Dieu sauve, c’est qu’il est Père, et c’est d’abord le Père qui se révèle au baptême. De lui vient sur Jésus, celui en qui Dieu est donné, l’Esprit Saint.

Lorsque le ciel est fermé c’est le signe de la non communication entre ici-bas et Dieu. Lorsque le ciel s’ouvre, c’est que Dieu rend accessible le monde qui est le sien. Or, le ciel s’ouvre quand Jésus vient au milieu des hommes : le Père approuve l’attitude de son Fils lorsqu’il le voit, mêlé à nous, au milieu de nous.

L’Esprit est ici une Personne. Jean annonçait l’Esprit comme un feu dévorant, or c’est sous la forme d’une colombe qu’il se donne à reconnaître et qu’il manifeste la plénitude de Dieu. Cette plénitude est tout entière contenue dans ce verset évangélique : « Tu es  mon Fils bien-aimé, tu es toute ma joie ». Ce mot est prononcé par le Père et il l’adresse au Fils et c’est l’Esprit qui le lui fait entendre. Toute la joie de Jésus consistera à faire la volonté du Père, c'est-à-dire à accueillir son amour et à lui répondre de tout son cœur, de toute son âme et de toute sa force.

Cette joie et cette force sont données à Jésus par l’Esprit qui ne vient pas – comme pour les prophètes – l’investir d’une force nouvelle, mais révéler ce qu’il est en vérité, le Fils unique et bien-aimé.

Cette parole n’est pas la parole de l’Esprit, elle est la parole du Père, mais c’est l’Esprit qui la fait retentir dans son cœur de Fils.

A l’heure de son baptême, à la voix qui descend du ciel et dans laquelle le Christ reconnaît celui de qui il tient tout ce qu’il est, répond de l’intérieur, présent en lui, le témoignage de l’Esprit qui l’habite et fait pénétrer la Parole du Père, faisant ainsi de toutes les fibres de son humanité l’incarnation et l’expression du Fils unique.

Comme nous, comme les pécheurs, comme la foule, Jésus est venu au milieu des hommes comme un mendiant de l’Esprit Saint.

Frères et sœurs, Jésus nous apprend ce matin ce qu’il attend de nous, il nous apprend ce qu’est un fils de Dieu :

  • Un homme qui porte les espérances de ses frères, un homme proche des autres, un homme humble qui marche, qui espère humblement avec ses frères.
  • Un homme qui porte au Père comme un mendiant les misères de ses frères et que Dieu vient exaucer en venant le rejoindre, l’éclairer, l’illuminer lorsqu’il le voit ainsi frère parmi ses fils ; il lui manifeste alors son amour non pas pour lui seulement mais surtout pour ses frères désespérés qu’il est venu rejoindre.

Jésus nous montre aussi ce que n’est pas un fils de Dieu :

  • Quelqu’un qui s’imaginerait qu’il est mieux que les autres et qui se tiendrait éloigné des pécheurs et des exclus.
  • Quelqu’un dont la prière aurait pour seule fonction de préserver sa pureté, de se protéger des autres.
  • Quelqu’un qui serait sûr de lui, qui n’attendrait rien des autres et qui oublierait que personne, même pas le Fils de Dieu, ne possède Dieu car Dieu se donne à rencontrer dans l’impuissance, dans la pauvreté, dans la fraternité, dans la compassion, dans l’amour et c’est là que le ciel s’ouvre et que chacun de nous peut entendre : « tu es mon fils (ma fille) bien-aimé, en toi, je mets toute ma joie »

fr. Jean-Luc