4° dimanche du TO (B) Mc 1, 21-28

Voilà un enseignement nouveau proclamé avec autorité ! Autorité de Jésus qui ne cessera d'être affirmée durant tout son ministère, durant sa courte vie publique. Autorité qui fait grandir et non pouvoir qui asservit. Autorité qui se manifestera de bien des manières par la suite. Autorité par laquelle Il va dire à l'un suis-moi et à un autre lève-toi ou, Je le veux, sois guéri ! Oui, autorité qui relève en redonnant dignité et goût de vivre, autorité qui met en route dans la vie vers la Vie. Et aujourd'hui, autorité par laquelle Jésus va dire au Mal, au Malin, avec fermeté : tais-toi ! Tais-toi et sors de là ! Laisse-le vivre ! Autorité qui va donc libérer d'un mal débilitant et mortifère, du Malin. Il n'est pas neutre de remarquer que ce dernier reste toujours en quelque sorte comme un corps étranger à l'homme qui devient son esclave, son pantin. Oui, le Malin ne nous est heureusement pas consubstantiel ! Il est par ailleurs intéressant de remarquer que cet esprit mauvais crie, voire éructe quelque chose à l'attention de Jésus, mais il ne parle pas vraiment et communique encore moins. Ce qu'il dit ou plutôt, divisé qu'il est, ce qu'ils disent à Jésus est très révélateur. Certains ont pu penser rapidement que ce démon croyait en Jésus. Non ! Certains ont pu penser aussi qu'il s'agissait finalement d'une véritable reconnaissance doublée d'une soumission à Jésus de la part ce démon et là ce n'est pas entièrement faux sauf que ladite reconnaissance s'inscrit plutôt dans un refus paniqué de Jésus ainsi que l'a très bien expliqué notre Père David en insistant sur le caractère désarticulé de ce qui est dit à Jésus. Et d'abord un refus total de la relation par ces mots : Que nous veux-Tu ? Mots qui peuvent aussi apparaître dans notre quotidien pour couper court à un dialogue : Tu veux quoi ? Tu me cherches ? Le Malin ne sait évidemment pas autre chose que diviser, couper l'homme de son cœur et de son frère. Et ce refus de la relation va s'inscrire, pour ce démon, dans une peur panique de Jésus : es-Tu venu pour nous perdre ? Mais surtout, il y a ces mots symptomatiques : je sais qui Tu es ! Des mots à ne surtout pas confondre avec un quelconque acte de foi : savoir n'est pas croire ! Cela me rappelle cette petite histoire avec notre Père Patrice au sujet du diable : Moi, le diable, je n'y crois pas disait-il au grand dam d'un autre frère désormais dans l'éternité. Oui, poursuivait-il, je sais que le diable existe et qu'il fait tant de mal mais je n'y crois pas car croire en quelqu'un c'est lui faire confiance et lui donner sa foi... et alors moi, terminait-il, c’est en Dieu que je crois, en qui j’ai confiance. Et dans notre Credo, c'est bien le verbe croire, credo en latin, que nous utilisons, et non savoir, scio en latin. Le savoir est très utile mais à la différence de l'acte de foi, il pourra nous laisser immobile sur le bord de la route de notre vie, peut-être comme certains des auditeurs étonnés de Jésus assistant à la scène décrite dans notre évangile du jour. Certains voire beaucoup sont perplexes sans être encore vraiment en état de pouvoir écouter, de passer du quoi au qui, de l'indifférencié, terrain de prédilection du démon, à la distinction qui permet la vie. Alors que le démon sait, eux, ils restent interrogatifs, étonnés. Ce n'est pas encore l'acte de foi accueillant la Parole du Verbe de Vie. Mais cela viendra pour eux en son temps comme cela ne devrait pas cesser d'advenir pour nous. Si pour l'heure, dans notre texte, il est écrit que la renommée, l'audimat superficiel concernant Jésus ne cesse de s'étendre, très bien, mais comme le dit encore frère David, il faut aller au-delà : Être disciple engage à laisser la rumeur (souvent déformante et faussée) pour s'attacher à Jésus qui parle personnellement et qui ne cesse de le faire à travers bien des médiations. La première lecture nous le suggère d'ailleurs bien : le peuple au désert a peur de cet impressionnant Dieu vivant presqu'en direct et qui finalement va en venir à la médiation des prophètes dans la bouche desquels Il mettra ses paroles, avant qu’un jour l’Un de la Trinité, Jésus, vienne nous rejoindre en toute humilité. Médiation qui va donc devenir aussi celle des disciples de Jésus, des apôtres de Jésus comme Paul l'a été, lui dont le texte lu aujourd'hui en deuxième lecture a quelque chose de provocant par les temps qui courent : J'aimerai vous voire libre de tout souci ! Le conseil qu'il donne au sujet du mariage pourrait surprendre mais il faut replacer cet écrit dans le contexte de l'époque où l'on aurait pu croire proche la parousie, la fin des temps. Conseil ou proposition de Paul de choisir ce qui est bien en étant attaché au Seigneur sans partage, sans petits démons venant se loger dans les plis et replis de notre âme. Belle proposition et appel à une pacification, une simplification, d'abord de son cœur pour mieux vivre son acte de foi, pour être plus véritablement disciple qui choisit la vie avec détermination et témoigne de cet amour déraisonnable d'un Dieu qui ne sait que se donner en ayant besoin de nous, du peu que nous pouvons apporter. Appel à être ce disciple à l'écoute mais qui aura pu être ou sera mis en route par une ferme parole d'autorité pour être à son tour médiation de cette Parole de vie et d'amour semés en nos cœurs, dans le cœur de l'autre à qui il convient de le lui témoigner d'une façon ou d'une autre. Oui, au-delà de bruyantes rumeurs intérieures qui risqueraient de nous rendre sourds à la relation, oser laisser Jésus nous parler personnellement pour partager un tant soit peu en ce monde inquiet, un petit peu de foi, d’espérance et de charité, de son amour, de cette Vie dans laquelle, vers laquelle Il veut tous nous entraîner avec humilité et respect de notre fragilité mais aussi avec autorité, une autorité qui fait grandir, croître. « Pourquoi te laisser abattre ô mon âme et t’agiter en moi, lisons-nous au psaume 41 (verset 12), aie confiance en Dieu. Oui, je veux le louer toujours, Lui mon salut, Lui mon Dieu ».

Frère Philippe-Joseph