28° Dimanche du TO*B Mc 10, 17-27

Quelle curieuse page !
Nous avons bien entendu : il faut tout quitter pour tout retrouver, au centuple, et avec une prime : les persécutions ! Bien honnêtement, qui serait tenté par le marché ? Même avec une promesse de vie éternelle pour plus tard, mieux vaut réfléchir à deux fois.

En vérité, Jésus paraît bien énigmatique, et plus que jamais cette page de Marc nécessite une autre écoute, toute spirituelle, sinon, nous risquons fort de rester à la surface des propos de Jésus.

Surtout, n'allons pas croire qu'il suffise de ne pas avoir d'argent pour obtenir la vie éternelle. Ce serait relativement simple ! Il n'y aurait vraiment pas trop de difficultés à devenir saints s'il s'agissait seulement de ne pas travailler ou encore de dépenser l'argent sans compter, pour vivre en pauvres, pour être « pauvres » à la manière de Jésus, et donc être dignes du Royaume !

Non, il ne peut pas s'agir de cela.
Aujourd'hui, les paroles qui nous sont proposées sont obscures. Pour les comprendre, il nous faut l'intelligence et l'esprit de Sagesse dont parle la première lecture. Car nous le voyons bien, les propos de Jésus restent cachés si nous en restons au plan humain, Jésus le reconnaît puisqu'il souligne lui-même que « pour les hommes, cela est impossible ». Il ajoute aussitôt après, que « tout est possible à Dieu ».

Oui, voilà bien la question que nous pose cette page : comment l'humain peut-il, en nous, céder la place au divin, ou mieux être repris par le divin ?

Pour mieux comprendre la pensée de Jésus, nous pouvons nous aider d'une autre parole du même Evangile de Marc, au chapitre 3 : « Quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère et ma sœur et ma mère ».

Jésus invite donc l'homme riche à passer sur un tout autre registre. Il n'est plus question de vie éternelle à gagner mais de LE SUIVRE, LUI, JESUS. Comme si la vie éternelle, c'était d'ÊTRE AVEC JESUS, de DEVENIR SON FRERE. Il ne s'agit plus de faire des efforts pour obéir à des commandements, il s'agit d'abord et avant tout, d'entrer dans une relation d'amour avec Jésus.

Plus profondément encore, il s'agit de découvrir que Jésus, lui, le premier, nous aime. C'est bien cela que veut nous dire l'évangéliste quand il fait remarquer, d'une manière merveilleuse l'attitude de Jésus : « Posant alors son regard sur lui, Jésus se mit à l'aimer. »

C'est ce regard qui bouleverse tout dans une vie, parce que tout devient possible suite à ce regard d'amour de Jésus.

Oui, pour réconcilier, en moi, l'humain et le divin c'est à l'Amour que je dois faire appel, Amour reçu gratuitement de Dieu qui en a imprimé sa marque au plus profond de mon cœur. C'est là son sceau, la marque de sa nature, qui, en Jésus seul, ne rencontre aucun obstacle, alors qu'en chacun de nous, en moi, il y a toujours conflit.

C'est d'ailleurs le seul conflit qui devrait occuper toute notre vie. Dans ce conflit, la Parole vient trancher puisqu' elle « juge des intentions et des pensées du cœur ».

Voilà pourquoi Jésus nous demande de renoncer à nos amours trop humains. C'est à dire qu'il nous faut mourir à ce qui,' dans nos attachements pour les êtres comme pour les biens, ne fait pas la première place à la vraie Vie, dans l'Amour dont procède tout amour.

Il nous faut déplacer l'exigence de Jésus et ne pas nous tromper de cible. Ce ne sont pas nos attachements humains qui font obstacle aux attentes que Jésus a de nous, mais plutôt la manière dont ces attachements vont, en nous, en moi, et par nous, par moi, entrer en contradiction avec mon amour pour Jésus.

Suivre Jésus, c'est me laisser aimer par Lui et me laisser conduire par Lui dans tout ce qui fait ma vie. Alors, les commandements ne sont plus pesants : ils deviennent des directions d'amour, des expressions d'amour en réponse à ce Jésus qui m'a aimé le premier et pose sans cesse son regard sur moi. Avec Lui tout devient possible !

Oh, Oui, viens Seigneur Jésus !

P. Jean-Marie